jeudi 28 avril 2011

Wikileaks - Les Etats-Unis voulaient bloquer l'enquête du juge Goldstone

Dans l’article précédent [Lien : Les poubelles chargées d’histoire – Rapport Goldstone] je tentais de montrer combien Israël jouait de son influence et exerçait des pressions pour "jeter aux poubelles de l’histoire" les faits macabres qui jalonnent son passé.

Mais, Israël peut compter sur son allié invétéré dans cette tâche : Les Etats-Unis. En effet, un document révélé par Wikileaks montre que ces derniers, par l’intermédiaire de Susan Rise auraient redoublé d’efforts pour éviter que le rapport Goldstone et ses conclusions n’aboutissent. [Lien – Nouvelobs (& Wikileaks) -  Guerre de Gaza : Les Etats-Unis voulaient bloquer l’enquête de l’ONU]  
Extrait :« Susan Rice souligne alors qu'une telle enquête n'est "pas nécessaire" et que l'affaire doit être "classée", selon un câble diplomatique américain. »

Les Etats-Unis aveuglés par leur soutien inconditionnel à Israël, semblent oublier que la paix prend avant tout racine dans la justice et qu’en humiliant ainsi le peuple palestinien ils ne feront que renforcer leur isolement sur la scène proche-orientale. 

mercredi 27 avril 2011

Des poubelles chargées d’histoire – Rapport Goldstone

Israël a pour mauvaise habitude de vouloir se débarrasser des tristes événements qui jalonnent son histoire.
Prenons par exemple l’interdiction de commémorer la "Nakba" (mot arabe pour catastrophe) qui désigne l’année 1948 pendant laquelle les Palestiniens ont subi un nettoyage ethnique. [lien – AFP -  La Knesset vote une loi contre la commémoration de la "Nakba"]
(Cf. : L’historien israélien Ilan Pappé dans son livre : « Le nettoyage ethnique de la Palestine). 

En l’occurrence, il s’agit cette fois du rapport Goldstone ; le magistrat sud-africain Richard Goldstone responsable de la mission d’enquête des Nations Unies sur la guerre de Gaza, a affirmé dans une tribune publiée le 1er avril dans le Washington Post : «  Si j’avais connu ce que je connais à présent, le rapport Goldstone aurait été un document différent ».

De fait, immédiatement le Premier ministre Benjamin Netanyahu déclarait : "J'appelle l'ONU à annuler immédiatement le rapport Goldstone. Il faut jeter ce rapport dans les poubelles de l'Histoire" [Lien - France 24 - Israël exige l'annulation pure et simple du rapport Goldstone

Mais peut être serait-il bon de contextualiser cette déclaration.

Le journaliste René Backmann a rédigé un article très complet à ce sujet dans lequel il montre combien les pressions sur le magistrat ont été fortes : [Lien : L’affaire Goldstone]
Ci-dessous un ensemble d’extraits de l’article témoignant des pressions dont le magistrat à fait l’objet  : [
- La haine à son encontre a atteint un tel degré qu’il a du renoncer, il y a un an à assister à la bar mitzvah de l’un de ses petits enfants. Selon le quotidien israélien Haaretz, la Fédération sioniste d’Afrique du sud (SAZF) et le rabbinat avaient conclu un accord avec la famille Goldstone, en vertu duquel le magistrat ne serait pas autorisé à être présent dans la synagogue de Johannesbourg où devait se dérouler la cérémonie. Selon le rabbin Moshe Kurtsag, membre du tribunal rabbinique local, Goldstone avait « fait un tort énorme non seulement à Israël, mais au monde juif. Son nom est utilisé, à travers le monde par tous ceux qui sont hostiles à Israël et cela ne peut qu’accroitre les vagues d’antisémitisme ».
- Pour le Premier ministre Benyamin Netanyahou, il est avec la menace nucléaire iranienne et les roquettes du Hamas « l’un des trois défis stratégiques majeurs d’Israël ».
- Les autres rapporteurs admettent aujourd’hui avoir subi, depuis près de deux ans, « des attaques personnelles et des pressions extraordinaires ».]

Mais comment le juge en est-il arrivé à ces nouvelles conclusions ? Il semble qu’aucun élément nouveau probant ne soit en mesure de justifier ces changements :
Extraits de l'article de René Backmann: [Le problème c’est que la lecture attentive du rapport des experts sur lequel dit s'appuyer Richard Goldstone ne confirme pas les « faits nouveaux » invoqués par Richard Goldstone. Sur la question – capitale – du caractère intentionnel des tirs sur les civils, ce document de 27 pages, rédigé par Mary McGowan Davis, ancien juge à la Cour suprême de l’Etat de New York et Lennart Aspegren, ancien juge à la cour d’Appel suédoise et au Tribunal pénal international pour Rwanda se borne à constater qu’il n’existe « aucune indication montrant qu’Israël a entrepris des investigations sur les actions de ceux qui ont conçu, planifié, ordonné et supervisé l’Opération Plomb Durci ». Ce qui est loin, on le voit, d'apporter un jugement nouveau sur l'intentionnalité des tirs.. » ]

Aussi, si le magistrat Goldstone semble revenir sur ses conclusions les co-auteurs du rapport eux ne semblent pas du tout partager cette approche :
Extrait de l'article de René Backmann: [Le pire, pour Richard Goldstone et le plus gênant pour Israël est venu jeudi d’une tribune sur le site du Guardian, signée des trois autres auteurs du rapport Goldstone. Dans un texte dévastateur où le nom de leur collègue n’est mentionné qu’une fois, Christine Chinkin, Hina Jilani et Desmond Travers, détruisent en quelques lignes ses principaux arguments et affirment qu’ils ne peuvent « laisser sans réponse les calomnies portées sur les conclusions de leur rapport. Les appels à reconsidérer, voire à retirer le rapport, tout comme les tentatives faites pour travestir sa nature et ses objectifs, ajoutent-ils, méprisent le droit des victimes Israéliennes et Palestiniennes à la vérité et à la justice. »]

Alors que pour tant d’autres éléments on insiste à juste raison sur le « devoir de mémoire » et les « leçons de l’histoire ». 
Israël semble appliquer le désormais trop célèbre axiome des deux poids deux mesures quand il s’agit de ses propres faits dans les tristes anales de son histoire...

dimanche 24 avril 2011

Bil'in, le choix de la résistance populaire non-violente

Bil’in c’est avant tout l’histoire de la lutte populaire non violente d’un peuple.
C’est plus de 6 années de manifestations hebdomadaires pour revendiquer la fin de l’occupation.
C’est une vague transnationale unissant dans un même cri Palestiniens, Israéliens (lucides de la politique d’annexion de leur pays) et Internationaux.
Bil’in c’est le courage d’aller affronter des soldats dont l’unique lucarne de pensée se résume à la répression violente. 
De ce fait, Bil’in c’est malheureusement des militants pacifistes tombés sous les tirs : Bassem Abu Rahma (Victime d’un tir de cartouche de gaz en pleine poitrine) puis un an et demi après sa sœur Jawaher (elle aussi victime des gaz) et bien sûr de nombreux blessés.
Bil’in c’est l’élan vengeur de l’armée israélienne qui souvent revient après la manifestation quand les journalistes et internationaux ont quitté le village pour pénétrer les maisons, procéder à des arrestations, punir collectivement tout le village.

Bil’in c’est aussi une révolte arabe, certes pas identique aux pays voisins, mais c’est une des voix qu’on choisit les Palestiniens. [Lien sur ce blog : Les printemps arabes … et le printemps de Palestine ?]
En terres occupées ces soulèvements ne visent pas leur propre autorité (palestinienne) quasi impuissante elle aussi face à l’occupation, mais la politique d’Israël ; c’est ainsi que le peuple réclame son droit à vivre en toute souveraineté, son droit à la dignité, sa liberté, …

Alors que nombre de Palestiniens sont terrifiés à l’idée des sanctions impitoyables qui s’abattraient sur eux en cas de protestations, le village de Bil’in a par son courage non seulement continué à lutter au quotidien mais également inspiré d’autres manifestations non-violentes du même type dans de nombreux autres endroits en Cisjordanie (Nil’in, Al Masara, Nabi saleh, …)

Ces mouvements populaires palestiniens non violents sont devenus aujourd’hui le symbole d’un peuple qui refuse de ployer et qui fort d’un courage prenant racine dans les droits de l’homme les plus élémentaires ose braver la machine à broyer israélienne,

Lire aussi :
- L'article d'une photographe et amie, Anne Paq : Bil'in, un village encore et toujours résiste aux envahisseurs - 22/04/2011
- Sur ce blog - La manifestation de Bil'in du 20 février 2009 : Bil'in, ... ou la quête de justice












[Palestine, Bil'in, vendredi 22 avril 2011]

jeudi 21 avril 2011

Al Walaja - Ce mur qui enterre une vie de berger ...

Cet article fait suite au précédent : Etranglement du village d’Al Walaja (Potins de Palestine, 20 avril 2011)

Ce berger (Photo 4) du village d’Al Walaja expliquait qu’une fois le mur érigé, il perdrait non seulement ses terres agricoles avec ses oliviers (qui sont pour lui une source substantielle de revenue) mais également l’ensemble des espaces de pâture pour ses bêtes. Les maigres espaces au sein du village étranglé par le mur qui resteraient disponibles ne suffiraient amplement pas à alimentation de sa vingtaine de chèvres, il se verra donc dans l’obligation de les vendre toutes.

Plus d’oliviers, plus de fabrication possible de fromage, plus de bêtes, vivant dans un village bulle à contempler les colonies rongeant ses terres, voilà l’avenir se profilant chaque jour un peu plus à ce paisible berger.


[Pour l'heure la ceinture du mur n'étant pas achevée, le berger et son fils peuvent encore se rendre sur leurs terres, mais chaque jour le chantier resserre son étau]



[Berger sur ses terres bientôt confisquées par le mur avec en arrière plan la colonie de Gilo]


[Al Walaja - Palestine - 20 avril 2011]

mercredi 20 avril 2011

Etranglement du village D'Al Walaja

Al Walaja est un village de taille modeste juché sur une colline surplombant Bethlehem. Les habitants de ce village sont pour une part agriculteurs et de nombreux autres travaillent à Jérusalem (où ils peuvent se rendre muni d’un permis).
Or, ce village est un ennui capital pour Israël, car il est situé entre Jérusalem et un vaste ensemble de colonies, appelé le bloc de Gush Etzion.
D’autre part, une colonie nommée Har-Gilo s’est installée à quelques pas du village et ce dans l’évidente intention de juguler toute expansion du village (car non seulement il y a les terres occupées par les constructions réelles de la colonie, mais celles prévues pour son accroissement et enfin il faut encore y ajouter une zone dite de "sécurité")

Dans un premier temps, considérant qu’Al-Walaja était sur les terres de Jérusalem (et dans une zone administrée par Israël) la technique a été d'y détruire régulièrement les maisons sous prétexte que les habitants n’avaient pas de permis de construire (et bien évidemment ces permis de construire lorsqu’ils étaient demandés, étaient systématiquement refusés).

Israël a maintenant changé d’approche et ceinture étroitement le village par la construction  du "mur de séparation". Officiellement pour des raisons de sécurité, mais en réalité cela permettra de créer une bulle hermétique (car les entrées et sorties dépendront d’un check-point ouvert selon le bon vouloir de l’armée) et donc de relier dans les faits Jérusalem au bloc de colonies.
Les habitant d’Al-Walaja seront eux séparés de leurs terres cultivables, dépendront d’un unique check-point pour leurs allers et venues et bien sûr le taux de chômage y explosera.

Le but, à peine dissimulé, de cette entreprise est d’étrangler toute viabilité au village pour que les habitants fuient et qu’à terme ces terres soient récupérées par Israël.



 [Terrassement pour y ériger le mur, les terres agricoles du village sont de l'autre côté du tracé]



[Al Walaja - Palestine - 20 avril 2011]

mardi 19 avril 2011

Israël va devenir membre du CERN

J‘ai déjà, à plusieurs reprises, expliqué que toutes formes de négociations étaient sous-tendues par un rapport de force [lien : Mode opératoire des négociations israélo-palestiniennes... les recettes d'échecs assurés.]. En effet, comment celui qui est dans la position de dominant et tire nombre de bénéfices de la situation pourrait infléchir sa position si aucune pression significative n’est exercée.

Ainsi, certes l’Europe et les Etats-Unis condamnent mollement chaque nouvelle décision de colonisation, de destructions de maisons, d’expropriations, etc … Et en parallèle déroulent le tapis rouge pour qu’Israël intègre l’OCDE, intègre l’Union pour la Méditerranée, signe nombres d'accords économiques profonds et de faramineux partenariats d’armement [Lien : Aide américaine à Israël: remerciements de Netanyahu - Extrait : "Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a exprimé samedi ses remerciements au président américain Barack Obama après qu'il a promulgué la loi budgétaire couvrant le solde de l'exercice 2011 et confirmé ainsi une aide militaire exceptionnelle à Israël."].
Comment Israël pourrait désirer infléchir son occupation alors que le pays tire à la fois nombre de profits de l’occupation elle-même et d’un soutien unanime de ces partenaires occidentaux ?

Et bien, ces pays occidentaux semblent ne pas saisir les leçons de ces échecs en cascade et annoncent :
- Le cabinet approuve l'adhésion d'Israël au CERN (Centre Européen pour la Recherche Nucléaire) devenant la première délégation non européenne membre de l'organisation.  

Et ce alors qu’Israël refuse obstinément de signer le traité de non-prolifération nucléaire, malgré les pressions de l’AIEA. [Lien : IAEA calls on Israel to sign Non-Proliferation Treaty]
Les meilleurs centres dans le domaine, vont donc coopérer avec Israël, alors que ce pays refuse toute forme de contrôle de ses installations nucléaires et n’a d’ailleurs jamais reconnu officiellement disposer le la bombe.

C’est certainement ainsi, que l’on exrpime tous nos attachements aux droits de l'homme et nos souhaits de voir l'occupation en finir. 

Bravo l’Europe !

lundi 18 avril 2011

De retour en territoires palestiniens …

Et comme toujours c’est la grande baffe, je ne parle même plus du check-point à traverser et du mur à longer à mon arrivée à Bethlehem, ces derniers ne sont en effet que la face visible de l’occupation qui s’immisce chaque jour dans les foyers bethlehémites et ronge leurs espoirs et corrompt leurs joies.

Non, aujourd’hui, je suis blessé par disparition d’un homme, Victorio Arrigoni’s, entièrement dévoué à la cause palestinienne, mort à Gaza (officiellement, en attendant les conclusions de l’enquête, assassiné par les salafistes). Ce militant était pétri de courage, de volonté et de convictions. Je ne le connaissais pas personnellement, mais les vidéos qu’il réalisait, les témoignages de personnes impliquées ici, attestent du charisme et de la grandeur de son combat au quotidien.
Il n’a pas hésité à se joindre aux pêcheurs gazaouis victimes des tirs de la marine israélienne, il accompagnait les paysans dans la "zone tampon" de Gaza aussi en proie aux tirs des snipeurs israéliens, il était présent à Gaza pendant l’opération "plomb durci" et  assistait le travail des ambulanciers.

Quelles peuvent être les motivations des hommes qui l’ont assassiné ?
Quels sont les objectifs qu’ils cherchent à atteindre à perpétrant de tels actes ?
Je ne comprends pas …

Puisse cet acte lâche et stupide ne pas décourager les militants des droits de l’homme,  renforcer même leur combat et leurs convictions.
Puisse de la tristesse, émerger une volonté inébranlable de poursuivre son combat pour la justice, l’égalité et la dignité.

Liens :

Photographies de la commémorations en hommage à Victorio Arrigoni’s et Juliano Mer Khamis (du Freedom Theater assassiné à Jenin le 04 avril 2011)





mercredi 13 avril 2011

Mais pourquoi manifester si Israël appelle à négocier ?

Cet article fait suite au précédent [Lien : Les printemps arabes … et le printemps de Palestine ?] qui soulève une inévitable question : « Pourquoi manifester, revendiquer, pourquoi se soulever si Israël en face renouvelle ses appels à la négociation ? »

Israël n’a en effet de cesse ces derniers temps d’appeler les Palestiniens à retourner à la table des négociations. Or aujourd’hui, les Palestiniens disent que : « la négociation est pour Israël une fin en soi. M. Netanyahu n’a que faire de trouver de réelles solutions, il négocie pour gagner du temps et faire bonne figure devant ses alliés occidentaux. Ces alliés qui eux peuvent alors avoir toute bonne conscience face à ce processus en marche et feindre d’ignorer le quotidien de l’occupation et ses conséquences. »
Pragmatiques ils poursuivront en demandant : « A qui profite les interminables dialogues, les recherches de consensus et les moult méandres des négociations ? » et de répondre « Au seul état (Israël) qui au quotidien use de ce temps pour coloniser, construire une politique de faits accomplis sur le terrain. Quels sont les bénéfices tirés par la partie palestinienne pendant ces dizaines d’années de négociations ? Quelles sont les améliorations à noter concrètement sur le terrain ? »
Ainsi, face à ces négociations qui se prolongent depuis tant d’années les Palestiniens sont catégoriques et les perçoivent au mieux comme de la nourriture pour médias occidentaux mais bien plus souvent comme une "couverture de bonne conscience" permettant à Israël de poursuivre en toute impunité l’occupation et la colonisation. 
C’est pourquoi, aujourd’hui, l’autorité palestinienne a affermi ses positions : « plus question désormais d’accords intérimaires, de poursuite de la colonisation pendant les négociations, de discussions sans utiliser la base des frontières de 1967. Si Israël souhaite réellement négocier et progresser cela doit d’abord être mesurable par ses actes. »

Cette approche est d’ailleurs aussi pertinente vis à vis d’Israël que des Etats-Unis [Lien : Les Palestiniens demandent aux Etats-Unis une "postion claire"], dont l’engagement n’est guère dissemblable. Que l’administration Obama fasse preuve d’une véritable cohérence, nécessitant de facto une certaine forme  de prise de risques (en matière de politique étrangère), ils ne peuvent pas souhaiter un accord véritable tout en bloquant les résolutions de l’ONU condamnant la colonisation par un veto. Quel paradoxe !

Ainsi, il semble que cette fois l’autorité palestinienne ait gagné en maturité, tirée quelques leçons de l’histoire, … Il ne reste plus qu’à espérer que le jeu des pressions et des divisions ne sapera pas cette fermeté affichée et que de "véritables partenaires" de discussions ne boycotteront alors pas la table des négociations sous des prétextes absurdes* (*comme Israël à l’habitude de le faire en refusant toutes conditions préalables, l’absence de mention de la ligne de 1967, etc…)

lundi 11 avril 2011

Les printemps arabes … et le printemps de Palestine ?

Un faisceau de questions se pose quant aux rapprochements qu’il est possible d’opérer entre les révoltes arabes et les actions entreprises en territoires palestiniens.
En effet, alors que les situations sembleraient comporter certains parallèles, les développements de terrain, eux, ne montrent que peu de similitudes. 
- Quelles en sont les raisons ?
- Pourquoi alors le monde arabe en pleine effervescence s’octroie moult avancées en matière de démocratie et d’acquisition de libertés individuelles, la situation au cœur des territoires palestiniens semble, elle, plutôt statique ?

Tant de questions, qui nécessitent en premier lieu de comparer les "degrés de démocratie" en interne puis dans un second temps de mesurer quelles sont (ou peuvent être) les réelles revendications ainsi que leurs chances d’aboutissement.

Premièrement constatons que si les Palestiniens ont bien tenté quelques timides manifestations de soutien aux révolutions arabes, de réels mouvements de revendications quant à la situation interne n’ont pas été observés.
Et pour cause, la situation des territoires palestiniens n’offre en réalité que peu de similitudes avec les élans qui ont animé les pays voisins.
Les raisons en sont multiples :
En premier lieu, contrairement aux pays voisins la démocratie semblait y primer jusqu’au basculement des élections législatives de janvier 2006 remportées par le Hamas.
C’est alors que tout c’est compliqué ; une spirale délétère (tensions inter-palestiniennes relatives au partage des pouvoirs, pressions de la communauté internationale, violences et arrestations sporadiques) ont fini par aboutir au schisme entre le Fatah (parti fondé par Yasser Arafat) au pouvoir en Cisjordanie et le Hamas dans la Bande de Gaza.
Depuis si la démocratie reste l’esprit affiché, les réalités semblent peu enclines à ce précepte :
-          Le mandat du président Mahmoud Abbas a expiré en janvier 2009 et faute d’accord entre les mouvements palestiniens il s’est prolongé de facto. L’occident, toujours en proie aux craintes de voir les islamistes prendre les rennes du pays, n’a formulé aucune critique.
-          La Hamas durcit régulièrement son emprise sur l’étroite bande côtière de Gaza et souffle le chaud et le froid. Ainsi, de nombreux signaux contradictoires émanent de ses dirigeants : tantôt rejetant les élections présidentielles annoncées pour au plus tard septembre 2011, puis en procédant à des arrestations de militants appelant à l’unité palestinienne, pour ensuite donner à l’inverse des signes d’ouvertures et de réconciliation.
-          De plus, les nombreuses arrestations de députés issus du Hamas et l’impossible mobilité entre Gaza et la Cisjordanie en raison du bouclage israélien empêche toute réunion constructive du parlement. Dès lors on voit mal comment rendre opérationnels les rouages démocratiques !
-          S’ajoute à cela les faibles marges de manœuvres de l’autorité palestinienne qui n’exerce qu’une souveraineté pour le moins parcellaire et fort relative sur ses territoires, Israël se permettant toute prérogative jugée utile pour sa sécurité et dans bien d’autres domaines (Permis de construire, gestion des ressources en eau, …)
-          Enfin l’occident, principal financeur des territoires palestiniens, use largement de tout un arsenal de pressions visant à infléchir les décisions des responsables palestiniens.

Aussi, si quelques manifestations ont bien lieu, elles n’appelaient non pas à la chute des dirigeants mais exhortaient à la réconciliation pour enfin pouvoir user de cette démocratie qui fut un temps opérationnelle. Cependant, "ces rassemblements prônant l’unité" semblent peu appréciés par l’autorité palestinienne qui se limite à quelques "déclarations de façade" ; et plusieurs fois à Gaza ils furent tout simplement réprimés avec violence. Enfin ces mouvements populaires semblent s’essouffler très vite aux profits des querelles maintenant enracinées entre principaux partis, du communautarisme, etc …

Et pourtant il existe en Palestine une profonde indignation, qui surpasse de loin les dissensions internes précédemment évoquées : c’est la colère induite par l’occupation israélienne.
Car, si le mécontentement palestinien est peu focalisé contre ses dirigeants, chacun est en droit de s’interroger sur les raisons qui font que ce peuple ne se soulève pas  pour réclamer : ses terres, des conditions de vie décentes, la liberté de circulation et son droit à vivre libre et  en toute souveraineté. En effet, si M. Moubarak, M. Ben Ali et consorts étaient les cibles de premier rang des contestations, les revendications populaires n’en restaient pas moins : plus de libertés, plus de pouvoir d’achat, plus de droits d’expression, la fin de la répression politique … Or c’est exactement ce à quoi le peuple de Palestine aspire au quotidien.

Signalons d’abord, car c’est capital, que ces manifestations existent, elles s’organisent toutes les semaines dans de nombreux villages (les plus connus étant : Bil’in, Ni’lin, Al Masara, … ). Elles rassemblent Palestiniens, Internationaux et une frange d’Israéliens conscients de la situation dans les territoires. Les slogans déclamés sont en partie semblables à ceux du reste du monde arabe : « Liberté, fin de la répression », mais à cela s’ajoute des revendications spécifiques à la situation comme : « la restitution des terres spoliées par le mur et les colonies », « la possibilité d’accès à leurs  champs et leurs puits », …  
Mais leur médiatisation n’est assurément pas semblable à celle des pays voisins, parce qu’elles les ont de longtemps précédées et ne font donc de facto pas parti du mouvement « des révoltes arabes ». D’autre part les populations palestiniennes sont infiniment moins nombreuses que celles des pays voisins et que les innombrables check-points parsemés dans le pays empêchent tout rassemblement de masse.
Evidemment, les dissensions politiques internes et les 60 années d’occupation ne contribuent pas à l’avènement d’importants mouvements unifiés et c’est une société civile profondément divisée qui doit faire face à cette occupation.
Il est important aussi de signaler que contrairement aux pays voisins, de telles manifestations palestiniennes restent aux yeux de l’opinion publique occidentale largement connotées négativement. Comme si leurs origines n’étaient du même ordre que dans les pays voisins, comme si la liberté appelée n’était pas sur la même échelle de légitimité.
Enfin, Israël a montré dans l’histoire tout son savoir-faire en matière de gestion de toute forme de soulèvements et une très large part des Palestiniens sont enclin au découragement et ont grande peur des sanctions qui en découleraient.

Il apparaît donc à la lecture de ces données que l’expression d’un mécontentement existe bel et bien. Cependant sa forme ne peut (de part les données de politiques internes et le surpuissant arsenal répressif israélien) prendre de semblables tournures qu’au sein des pays voisins.
Une fois de plus les Palestiniens devront trouver leur solution propre pour aller quérir leurs libertés fondamentales, leurs droits à la terre, la justice et l’égalité.

Ainsi, s’il existe bel et bien des parallèles à faire entre les manifestations des peuples arabes et celles du peuple de Palestine, la comparaison est somme toute à circonscrire.
Car, les Palestiniens exigent de leur gouvernement l’union et non la chute et les manifestations qu’ils entreprennent résonnent des cris "libertés", "fin de l’occupation" et ces aspirations, elles, ne dépendent cette fois pas de leur gouvernement.

lundi 4 avril 2011

Destructions de maisons palestiniennes et folle croissance des colonies ...

Pendant que de nouvelles colonies ne cessent de croître en terres palestiniennes [Lien - AFP - feu vert à 942 logements à Jérusalem-Est], l’UNWRA annonce un record pour le troisième mois consécutif de destructions de maisons palestiniennes [lien - AFP - Cisjordanie/destructions: un record] .
Le communiqué précise : « qu’au total, "76 maisons ou structures palestiniennes ont été détruites en mars, contre 70 en février et 29 en janvier". "Suite à ces destructions, en mars, 158 personnes se sont retrouvées sans logis, dont 64 enfants, 105 autres en février, dont 43 enfants, et enfin 70 autres en janvier, dont 47 enfants" »

Quelques tristes illustrations de cette politique de dénis de droits les plus élémentaires et de flagrantes  discriminations sur le blog d’une amie photographe (Blog : Chronique de Palestine de Anne Paq)